coaching


Le modèle « Cascade inverse »

Objectifs

Cet outil mis au point par Michel Moral a pour objectif de provoquer une prise de conscience chez le demandeur au niveau de l’empathie ou de la théorie de l’esprit. Il est donc approprié lorsque le client est englué dans un dilemme et que le demandeur ne parvient pas à l’accompagner vers une résolution.

Par exemple, en supervision de superviseur, le demandeur évoque un coach qui est déchiré entre transgresser son code de déontologie ou perdre un important marché. Pour accompagner cette situation le demandeur doit pouvoir entrer dans le monde du coaché et le comprendre.

Ce mode est délégatif. Il est plutôt destiné à être utilisé en supervision ou intervision avec un groupe de coachs aguerris ou bien en supervision didactique.

Déploiement en supervision

Le demandeur expose rapidement le cas. Il prend ensuite le rôle de son client.

Il est supervisé successivement pendant 5 minutes par trois des membres du groupe de supervision ou d’intervision.

Les instructions données par le superviseur sont que :

– Après la première supervision, la seconde et la troisième doivent être en rupture. Un moyen simple pour assurer cette rupture est que le second superviseur aille sur des regards de 7eyed qui n’ont pas été explorés par le premier. De même le troisième superviseur va sur les regards de 7eyed qui n’ont pas été explorés par les deux premiers.

– Le passage d’un superviseur à un autre doit se faire le plus rapidement possible pour que le demandeur ne puisse « se reprendre ».

– Les interventions des superviseurs 2 et 3 peuvent aller vers plus de confrontation.

Après les trois supervisions le superviseur du groupe questionne le vécu des superviseurs en commençant par le premier. Il laisse ensuite le demandeur conclure sur son progrès intérieur.


Le modèle « 4 rooms of change »

Objectifs

L’origine est une des théories du changement des émotions humaines. Le modèle a été créé par Claes F. Janssen, un psychologue Suédois professeur à l’université de Stockholm.

Il fonctionne en se déplaçant dans quatre pièces qui symbolisent quatre états intérieurs.

Le présupposé de Claes est que dans tout changement nous effectuons plusieurs mouvements en passant :

– Dans un premier temps d’un Contentement, perdu, à un Déni qui est une réaction inconsciente de protection des choses anciennes.

– Ensuite, le déni devenant conscient, nous traversons vers une forme de dépression qui nous conduit au stade de Confusion qui se termine lorsque nous acceptons d’abandonner ce qui doit l’être.

– Nous pouvons alors progresser vers le renouveau fait d’Inspiration et d’action.

Chacun des quatre stades est accompagné de sensations et d’émotions qui sont sa signature. En travaillant sur les émotions il est possible d’identifier le stade et de le dépasser.

Cet outil est très puissant en coaching individuel et collectif ainsi qu’en psychothérapie. Il l’est aussi en supervision pour aider le superviser à aider lui-même un client bloqué dans son processus de changement. Il est très utilisé dans les pays Nordiques et les pays de l’Est.

Les sensations liées au désir de changer.

Chaque stade a ses émotions et sensations propres :

INSPIRATION/ACTION : Oui , je suis prêt à changer, je me sens excité, curieux, enthousiaste, en mouvement…

CONFUSION : Changer, oui, mais pas encore prêt, pas les ressources, confus, frustré, hors contrôle…

CONTENTEMENT : Je suis bien, content, heureux, serein, présent, confortable…

DENI : Je ne me sens pas bien : tendu, anxieux, inquiet, paresseux, révolté, incompris… Le passage d’inconscient à conscient se manifeste par l’apparition d’un désir d’inspiration.

4 rooms of change

Le passage de DENI à INSPIRATION/ACTION

Entre DENI et ACTION il y a l’état de CONFUSION avec l’apparition de choix multiples dont celui de ne rien faire faute d’énergie. Passer à l’action demande un CHOIX, REALISTE et du COURAGE.

S’il y a « renoncement au renoncement » les différentes options se précisent et le passage par le « Point zéro de la confusion » permet de faire référence au CONTENTEMENT et visualiser le véritable désir.

 

Déploiement en supervision

Sur un paper-board ou un tableau magnétique avec des plots aimantés, le supervisé place avec l’aide du superviseur sur une carte (voir plus haut le schéma) les verbatims, sensations, émotions exprimés par son client.

Ces éléments vont former un nuage qui est plus dense à l’endroit où se situe le client dans son effort de changement. Les obstacles sont également mis en évidence et peuvent donc être analysés.

Références :

Janssen C. (1996) The Four Rooms of Change (Förändringens fyra rum), Stockolm : Wahlström & Widstrand.


Le vieil homme et la sauterelle

Swann Léo

Il était en Afrique un essaim de sauterelles,

Réputées pour leur voracité, leur rapidité et les destructions qu’elles engendraient.

Volant de village en village,

L’essaim ravageait, les champs, les récoltes et les réserves.

Les hommes avaient beau enterrer le grain, colmater les fissures des jarres,

Barricader leurs cases, rien ne leur était laissé par celui-ci.

Et lorsque résonnaient les milliers de claquements d’ailes s’éloignant,

Ils n’avaient plus que le sable et la terre sèche à irriguer de leurs larmes.

 

Il était aussi en Afrique un vieil homme,

Réputé pour sa sagesse, son dévouement et les solutions toujours subtiles qu’il imaginait.

Il avait, plusieurs fois sauvé son village des désastres :

De la famine, des guerres civiles et de quelques conflits internes.

Sa parole était respectée et ses avis souvent suivis.

Un soir, alors que son village venait d’être ravagé par l’essaim,

Il trouva au fond d’une jarre, jadis pleine et à présent vide,

Une sauterelle, laissée à la traine par ses congénères,

Le ventre alourdit par la nourriture elle ne pouvait plus s’envoler pour fuir.

L’homme approcha une main plus longue et large que l’insecte tout entier ;

Et l’enlevant à la vindicte populaire, le cacha dans son pagne.

 

Arrivé chez lui, une sobre case à l’écart des autres,

Il sortit la sauterelle de son vêtement et la déposa sur sa table,

Un simple rondin avec trois pieds,

Et s’accroupissant à la hauteur de son hôte, il entreprit de s’entretenir avec elle.

Il la questionna sur la raison de ces destructions,

Lui fit voir l’impossibilité des hommes et des sauterelles à cohabiter tant quelles dureraient.

Il lui montra à quel point l’insecte, seul, était faible, et combien précaire était sa situation,

Il l’interrogea sur ce qui motivait l’essaim,

Sur ce qui lui permettait d’abandonner les siens sur la route.

 

Il apprit beaucoup :

Que l’essaim ne pensait pas, qu’il ne s’organisait pas,

Que les sauterelles fonctionnaient comme une énorme volute de fumée, une tempête,

Que chacune suivait sa voisine, qui suivait sa voisine, et cherchait à se nourrir.

Alors le vieil homme lui parla d’organisation sociale,

D’agriculture et de sédentarité,

De conscience individuelle et d’intérêt collectif.

Il lui montra que chacune méritait d’être écoutée par l’essaim,

Qu’il devait suivre les meilleures initiatives,

Et s’inscrire dans la durée du monde qui l’hébergeait.

 

Puis, il offrit à la sauterelle de l’héberger le temps qu’elle digère,

Avant de la laisser rejoindre l’essaim pour répandre ce qu’elle avait appris.

Le lendemain, elle déploya ses ailes au premier rayon du Soleil,

Et retrouva son essaim avant midi.

Sa parole fit l’effet d’un tremblement de terre auprès des sauterelles,

Elle était si convaincue qu’elle en était convaincante,

Et une fois l’étincelle de la pensée allumée,

Il fallait peu de temps pour que celle-ci se mue en conscience complète.

Alors l’essaim ralentit son vol et pour la première fois se posa.

Il fut organisé des discussions publiques,

Il fut décidé des répartitions des tâches,

Et les sauterelles se mirent à cultiver.

 

En un mois la parole du vieil homme,

Volontairement ou non l’histoire ne le dit pas,

Eu raison de l’essaim tout entier.

Les pattes arrière puissantes des insectes n’étaient pas adaptées aux travaux des champs,

Les prises de décisions s’éternisaient dans la discussion,

Et la pensée empoisonnait la mobilité de l’essaim.

Le peu de ressource que la petite taille des sauterelles leur permettait d’accumuler

Ne leur permit pas de survivre assez pour voir advenir la première récolte.

 

La morale, puisqu’il en faut une, est simple : il faut se méfier des libérateurs, de leurs bonnes idées et des solutions innovantes ; non contents de parfois poursuivre leurs propres objectifs (aussi altruistes qu’ils soient), il leur arrive parfois de réduire à néant des formes plus adaptées et plus résilientes. Il faut aussi se souvenir que la conscience individuelle, ainsi que la pensée, bien souvent mène à la disparition des modèles d’organisation qui ont pu émerger. Ce n’est pas forcément un mal, mais ce n’est pas, semble-t-il, la panacée qu’on nous promettait.

 


Les enseignements de l’Est sur la supervision

Michel Moral

Mon mot du jour concerne l’Université d’été de l’ANSE qui a eu lieu à Zadar en Croatie du 17 au 21 aout avec un programme particulièrement riche. Une centaine de superviseurs de 18 pays y participaient.

C’est seulement la deuxième fois qu’un Français participe à un évènement de l’ANSE, la première était le colloque de Budapest les 24 et 25 Avril.

Il s’agit pourtant d’une association de superviseurs et de coachs forte de 8000 membres dans 22 pays (de l’est et du nord de l’Europe essentiellement et depuis peu en Espagne et Italie). Quatre jours pleins ont permis de passer d’une compréhension superficielle à de réels échanges préfigurant une coopération féconde. Les discussions avec les principaux responsables ont permis de saisir les dimensions humaines, les valeurs et les aspirations qui nourrissent cet ensemble d’associations locales coordonnées de façon très démocratique.

Contrairement aux associations de coachs Françaises ou Anglaises qui introduisent progressivement la supervision dans leur offre, l’ANSE est au départ une association de superviseurs des métiers de l’accompagnement (psychologues, psychothérapeutes, psys du travail, médiateurs, etc…) qui va vers le coaching et dont l’identité couvre désormaist les deux professions.

J’ai noté de grandes différences avec nos approches « de l’Ouest » :

  • La chaleur humaine. Le ressenti est totalement différent par rapport aux réunions de coachs ou de superviseurs en France, UK, etc… Peut-être les épreuves traversées (chute du communisme il y a 25 ans, guerres des Balkans, fin de l’hégémonie soviétique,…) ont contribué au rapprochement entre personnes et pays. Peut-être que le fait de couvrir les métiers de la souffrance confère plus d’humanité et moins de concours d’ego. Peut-être est-ce culturel, ces pays étant comme des huitres, dur à l’extérieur mais sensibles à l’intérieur…

 

  • Vision de la supervision. La supervision est clairement vue comme une profession qui demande une formation charpentée conclue par une évaluation et l’un des workshops était d’ailleurs consacré aux méthodes actuelles et futures pour évaluer les superviseurs. Les formations de superviseurs (120) ont le plus souvent un minimum de 300 à 350 heures de présence sur deux ans et vont dans certains pays jusqu’à trois années universitaires de niveau Master 2. Il faut toutefois tenir compte du fait que c’est souvent la première formation, avant même celle de coach, alors qu’à l’Ouest on devient coach avant, éventuellement, de devenir superviseur. La question de l’accréditation n’a pas été traitée au cours de ce séminaire.

 

  • Concepts. De façon très claire et explicite, la supervision porte beaucoup plus sur le complexe « contexte/système/organisation » que sur le complexe « intrapsychique/interpersonnel/alliances ». Bien entendu aucun des « 7 eyes » (Lamy & Moral, 2015, p.123-145) n’est exclu mais le cocktail est composé différemment. Cela se traduit par le fait que plusieurs des 23 compétences du référentiel ANSE/ECVision portent sur la compréhension et l’action sur les organisations, sur le pouvoir et sur le leadership, notions qui sont absentes des compétences de coaching l’ICF, l’AC ou l’EMCC et des compétences de superviseur de l’AC et de l’EMCC.

 

  • La diversité. La diversité est une valeur essentielle pour l’ANSE et 4 des 15 workshops y étaient consacrés. L’ANSE promeut en particulier le concept de Groupe d’Intervision International (IIG) qui doit assembler trois nationalités au minimum et permettre aux membres de se rencontrer deux fois par ans.

 

  • Le regard sur le monde. Les cinq plénières étaient consacrées à des bilans sur les recherches pragmatiques relatives à la pauvreté dans le monde, à l’austérité en Europe du Sud, au rôle du superviseur et du coach dans la société, aux tendances sociales et au rôle du politique. Par contre aucune donnée sur la démographie de l’ANSE n’est disponible. Notons qu’à l’inverse les « coachs de l’Ouest » sont pour leur part abreuvés de données sur ce qu’ils sont et sur leur marché par l’ICF, Ridler, Brasser, ICTP, etc.. mais peu sur le monde qui les entoure.

 

  • Le « care » ; La crise du « welfare » est abordée de front et les solutions politiques analysées sans fards. Le superviseur et le coach sont vus comme porteurs d’une mission de « care » sur le long terme. Cependant, les superviseurs et coachs doivent savoir rester à distance des idéologies tout comme le psychothérapeute et le coach doivent savoir analyser leur contre-transfert et non y céder. Il a beaucoup été question de politique examinée à l’aune de la science alors qu’à l’Ouest c’est un non-sujet.

 

  • Gouvernance. L’association ombrelle (ANSE) fournit plutôt des recommandations que des produits finis applicables uniformément dans tous les pays. Ainsi par exemple les 22 associations locales (OVD, DGSv, LVS, etc..) ont chacune leur propre définition de la supervision et des référentiels de compétences différents. L’argument est que les besoins et la culture étant différents, les professions sont différentes. Un grand chantier à venir est donc la reconnaissance mutuelle afin d’aboutir à une profession de superviseur plus uniforme et surtout reconnue partout en Europe.

L’ANSE a une stratégie et un plan d’action sur quatre ans qui sont disponibles sur le site. Les principaux éléments concernent :

  • A court terme, le plan vise à disséminer et promouvoir le référentiel des 23 compétences relatives au coaching et à la supervision publié en mars. A noter que quelques grandes sociétés internationales prévoient déjà de construire leur propre référentiel de coaching en puisant dans les 23 compétences de l’ANSE/ECVision. Cela renverse potentiellement le jeu actuel où les associations (ICF, AC et EMCC) promeuvent des accréditations prenant en compte l’expérience sur la base de leur propres référentiels de compétences (pour le coaching : 11 pour ICF, 12 pour l’AC et 8 pour l’EMCC).

 

  • A moyen terme (2016-2017) le plan comporte de nombreux éléments dont deux qui nous semblent particulièrement prometteurs : la création d’une carte professionnelle de superviseur valide dans tous les pays d’Europe, et un colloque pour les formateurs de superviseurs (environ 120 écoles dans les pays couverts par l’ANSE).

 

  • Enfin, à long terme le plan est de faire de la supervision une profession reconnue par l’UE.

Au niveau des techniques, on retrouve nombre d’outils classiques à l’Ouest (« 7 eyed », Cascade, « devils and Angels », etc..) mais beaucoup d’autres sont inconnus de notre côté du Rhin. Il en est de même pour les techniques de formation à la supervision. Il y a en particulier en Estonie, petit pays de 1,3 millions d’habitants, une formation de superviseurs tout à fait inspirante et dont nous allons nous inspirer (L’Estonie abrite une association de superviseurs de 63 membres, plus que l’AOCS et PSF réunis…).

Enfin, Nous avons pensé qu’il serait plus facile pour ceux que cela intéresse d’aller chercher les documents auxquels nous faisons allusion dans ce bulletin ou les précédents directement sur notre site. Cela concerne :

Les documents que l’ANSE nous a autorisé à diffuser, en particulier le référentiel des 23 compétences (« ECVision Competence Framework 032015 »)

  • Nos articles et recherches sur la supervision,
  • Certains articles scientifiques du domaine public cités dans nos précédents bulletins,
  • Des documents que d’autres auteurs nous ont autorisé à diffuser comme l’enquête mondiale de Peter Hawkins sur la supervision présentée à Oxford-Brookes le 11 juillet : il y a en particulier une analyse des prix pratiqués (slide 13 : « Patterns of payment for supervision »)

Ces documents sont disponibles ici

Belle fin d’été.


Qu’est-ce qui explique l’intelligence collective ? 

Michel Moral

Le mot de ce jour concerne la recherche publiée en décembre 2014 par David Engel à propos de l’intelligence collective et qui a suscité pas mal d’échanges entre superviseurs de différents pays. Un des thèmes qui préoccupe actuellement les superviseurs anglo-saxons est en effet la supervision des coachs d’équipe et les techniques afférentes.

Cette recherche fait suite à celle, très remarquée, d’Anita Woolley publiée en 2011.

La plupart d’entre vous ont dû en entendre parler. Pour mémoire la recherche de Woolley porte sur 200 groupes soumis à 10 tâches différentes. L’analyse statistique fait apparaître qu’un seul facteur peut expliquer 43% de la performance.

Ce facteur baptisé « intelligence collective » par Woolley est très corrélé avec la façon de distribuer la parole au sein du groupe et avec la « sensibilité sociale » (intelligence relationnelle) totale mesurée à l’aide du test « Reading the mind in the eyes » de Baron-Cohen (2001) .

La recherche de David Engel porte sur 68 groupes. L’objectif est d’explorer dans quelle mesure l’intelligence collective émerge dans des groupes travaillant online.

Elle reprend le protocole de celle d’Anita Wolley avec les variantes suivantes :

  • Une partie des groupes communique en face à face tandis que l’autre ne communique qu’en ligne, par du texte seulement, via un système partagé. Les membres de ces derniers groupes n’ont jamais rencontré leurs coéquipiers.
  • La contribution des membres qui communiquent en ligne est mesurée par la quantité de texte envoyé.
  • La personnalité des participants est mesurée avec le « Big 5 » et agrégée en un facteur de personnalité par groupe.
  • Les tâches sont plus nombreuses et plus variées.

Les résultats sont intéressants, en résumé :

  • Le facteur « intelligence collective » explique 49% de la performance pour les groupes face à face et 41% pour les groupes online.
  • Le total des scores au « Reading the Mind in the Eyes Test » est fortement prédictif de l’intelligence collective, aussi bien pour les groupes face à face que pour les groupes online.
  • Comme pour la recherche de Wooley la présence de femmes a un effet positif sur l’IC mais l’intelligence cognitive des membres n’en a que peu.
  • Le facteur de personnalité par groupe n’a pas d’effet sur l’IC.

Ce que montre la recherche d’Engel, c’est que le test « Reading the Mind in the Eyes » donne une bonne mesure de la « Théorie de l’Esprit », terminologie que les auteurs préfèrent à celle de « sensibilité sociale » utilisée par Woolley.

Mais, et c’est là le fait le plus significatif, ce test mesure également très bien notre capacité à « lire entre les lignes » l’état d’esprit et les intentions de l’autre dans du texte online (mails par exemple).

C’est une information très importante à une époque où nous coachons des équipes dispersées à travers le monde et nous supervisons, parfois à distance, des coachs qui ont la charge de telles équipes. Combien de fois sommes-nous tombés sur des situations de mails sur-interprétés qui conduisent à de graves malentendus ?

La bonne nouvelle est que la possibilité d’améliorer la « sensibilité sociale » existe. Métaphoriquement il suffit de lever les yeux depuis notre nombril vers le regard de l’autre. Cette discipline intérieure du coach et du superviseur peut s’acquérir simplement par entrainement.

A noter que d’autres test existent pour mesurer la « sensibilité sociale » tels que « Faux Pas Recognition », « Reading the Mind in the Voice » et « Social Reasoning Wason Selection » et il est à prévoir qu’ils prédisent également la capacité à lire entre les lignes.

Pour finir, le programme de la cinquième conférence internationale sur la supervision des coachs est maintenant disponible. La conférence aura lieu cette année le 11 juillet au John Henry Brookes Building à l’Université Oxford Brookes.


Les superviseurs et la culture coaching

Mon mot du jour concerne le rôle des superviseurs dans un champ particulier du coaching : la« culture coaching », notion qui prend de plus en plus d’importance chez nos grands clients internationaux.
L’examen des thèmes abordés dans les colloques internationaux montre en effet que les coachs y réfléchissent depuis 2003, mais plus encore depuis peu, et que les superviseurs commencent à y penser sérieusement depuis un an.

Tout d’abord, de quoi s’agit-il ?
Je crois que les premiers à en parler ont été Janice Caplan en 2003 (« Coaching for the Future », CIPD) et Alison Hardingham en 2004 (« The Coach’s Coach », CIPD).
David Clutterbuck et David Meggison (proches de l’EMCC) dans un ouvrage paru en 2005 (« Making coaching work: creating a Coaching Culture », CIPD) donnent cette définition : « La culture coaching existe lorsque le coaching devient un style prévalent de management et de travail en commun avec pour finalité de faire croître à la fois l’organisation et les personnes »

Il s’agit donc d’une modification de la culture d’entreprise visant à introduire des valeurs detransformation et de culture cohésive (des valeurs de niveau 4 et 5 dans CTT) dont on sait qu’ils sont les prérequis à l’intelligence collective. Cette idée de culture plus transformationnelle et plus cohésive a progressivement évolué vers celle d’une approche permettant de coordonner l’ensemble des missions de coaching pour mieux les mettre au service de la stratégie de l’entreprise.

En 2012, Peter Hawkins (proche de l’EMCC et de l’APECS), dans son livre « Creating a Coaching Culture » (McGrawHill), pose la question de la culture coaching en ces termes : « Quelle contribution unique peut apporter le coaching aux besoins de demain ? ».

Dans les années 90 le besoin de demain (donc de 2015…) était très clairement identifié comme le développement de leaders capables de relever les défis du 21ième siècle. L’industrie du coaching a bien répondu à ce besoin au point qu’une majorité des missions de coaching individuel actuelles comportent un objectif sur le développement du leadership.

Aujourd’hui, il n’est pas évident que les missions de coaching soient aussi bien connectées aux besoins de demain et il est rare que les questions suivantes soient posées : « Qu’apprenons-nous de l’ensemble des actions de coaching qui ont été menées ? » et « En quoi cet ensemble d’actions sert la stratégie de l’entreprise ».
Dans un ouvrage récent (« How to create a Coaching Culture » paru en 2014) Gillian Jones et Ro Gorell (proches de l’AOCS et de l’ICF) établissent qu’il y a deux approches : « Vous pouvez soit aligner la culture d’entreprise sur la stratégie de l’entreprise, soit considérer cette culture comme votre stratégie ». Dans les faits, on observe le plus souvent une combinaison des deux approches, certains éléments de la stratégie pouvant être des éléments de culture (par exemple, « devenir solidaires » comme élément de stratégie ou « solidarité » comme élément de la culture cible). Ce qui différencie les deux approches est le « comment ».

Bien entendu, un certain nombre d’outils de mesure des progrès de l’implantation de la culture coaching ont fleuri ici et là et je peux envoyer à ceux que cela intéresse un exemple de ces outils présenté au colloque EMCC tenu à Venise en novembre 2014.

Toutes ces notions sont probablement très familières aux coachs de dirigeant et aux coachs internes qui sont les premiers concernés et je m’excuse d’avoir été un peu long dans cette introduction.

Et la supervision dans tout cela ?
Les superviseurs internationaux savent bien que la guerre des coûts directs est en cours d’achèvement, à coups de délocalisation, de verticalisation et d’externalisation, et que celle des coûts indirects l’est également.
La bataille de la compétitivité se déplace donc désormais vers la culture d’entreprise avec pour enjeu de d’occuper rapidement le champ des valeurs transformationnelles et cohésives qui sont le socle de l’intelligence collective.

Les associations de superviseurs ne sont pas toutes au même niveau de réflexion sur le sujet. L’AOCS qui s’appuie sur Ashridge (grosso modo l’équivalent UK du CRC d’HEC ou de l’INSEAD) est en pointe en raison d’un background très entrepreneurial.  Elle mène le bal en incluant les autres associations comme l’ICF, l’EMCC, l’AC et APECS dans ses réflexions.
Les axes des groupes de travail portent sur les façons de coordonner la supervision des coachs internes et externes en vue de mieux servir le développement de la Culture Coaching.
Ceci conduit inéluctablement à ce que les organisations portent un regard plus attentif sur la qualité des superviseurs des coachs qu’elles emploient. Elles insistent donc auprès des associations pour qu’il existe des formations et des accréditations de superviseur. Bien sûr, certains entrevoient de possibles dérives (instrumentalisation des superviseurs par exemple) et le champ de réflexion est très vaste.

Du côté de l’Europe Centrale l’ANSE n’est pas très active sur le sujet. Il existe quelques groupes de réflexion, en particulier autour de Frank Bresser mais je n’ai pas encore investigué en profondeur de ce côté. « One problem at a time… » nous verrons cela plus tard.